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Mylène JAMPANOÏ, le repos d’une guerrière

Actrice au cheminement indépendant, Mylène Jampanoï s’est d’abord fait un nom dans le cinéma international, notamment asiatique, étant souvent réclamée pour son métissage franco-chinois. La ravissante Aixoise, réputée pour sa beauté incendiaire, a beaucoup tourné dans des films où violence et sexualité sont omniprésentes. Aujourd’hui, elle aspire à la douceur, à une vie plus sereine, parce qu’elle est devenue mère et également scénariste, après avoir fait la Fémis, l’une des plus grandes écoles de cinéma françaises. C’est à Marseille, qu’elle adore et où elle a toujours des amis, qu’elle a décidé de vivre une partie de l’année…

ToutMa : On t’aperçoit dans quelques scènes de Madame Claude de Sylvie Verheyde, sorti en avril sur Netflix. Parlenous de ce film, de ce que tu penses de ce personnage tristement célèbre…

Mylène Jampanoï : Justement, je n’avais pas forcément envie de tourner dans ce film axé sur une femme incarnant la soumission féminine dans une époque où les hommes avaient tous les droits… Mais il a été réalisé par une femme que j’aime beaucoup, avec qui j’ai d’autres projets. J’ai voulu lui plaire et puis je savais qu’on jouerait dans des décors extraordinaires. Et finalement, son point de vue était différent de ma vision. Sylvie a montré Madame Claude avec ses failles, ses fêlures pour expliquer son basculement dans la voyoucratie. Cette sensibilité m’a intéressée. Maintenant, je t’avoue que depuis que j’ai mon fils, j’avais décidé d’abandonner tous les rôles de fille sexy…On dira que celui-là est le dernier ! (rires)

TM : Quels sont tes liens, tes projets avec cette réalisatrice ?

MJ : Déjà, elle a produit mon court-métrage. En fait, je l’ai rencontrée grâce à Stella, un très joli film avec Benjamin Biolay, sur son enfance à elle… Pour l’anecdote, j’étais sur un tournage en Inde et j’avais donc peu de moyens de me divertir avec des ouvrages en français. On me prête le DVD et là, je ne cesse de pleurer car son enfance incomprise me semble si proche de la mienne ! Je rêve alors de rencontrer Sylvie en rentrant à Paris pour lui dire à quel point j’ai aimé son film… Je lui confie mon coup de foudre et elle, en retour, me propose d’écrire ensemble un scénario. Très vite, Sylvie m’affirme que je suis douée et qu’il faut que je me projette autrement dans ce métier, pour être plus solide. Grâce à ces mots, c’est vraiment devenu une amie…. Ensuite, j’ai fait la Fémis, et j’ai appris.

TM: Qu’est-ce qui t’a, un jour, donné envie de faire du cinéma ?

MJ : D’abord, très jeune, j’ai vu le film Festen, qui m’a bouleversée. J’ai pris une claque. Ensuite, j’ai découvert le cinéma des frères Dardenne, avec un film d’ailleurs primé à Cannes dans lequel jouait Émilie Dequenne [Il s’agit du film Rosetta, N.D.L.R.]. À l’époque, je sortais beaucoup le soir, j’avais une vie un peu dissolue, des parents souvent absents, bref, une adolescence un peu mouvementée… À travers ces personnages complexes, propres au cinéma d’auteur, je me suis sentie moins seule. Je pouvais m’identifier. Je me suis dit : le cinéma est grand. J’ai alors eu envie d’être là, de faire ça…Après, la vie m’a ramenée à mes origines. Les rôles que je voulais ne m’étaient pas proposés en France. L’Asie m’a offert la possibilité de découvrir cette autre partie de moi, à travers le travail que j’ai eu à fournir pour comprendre mes personnages, comme un chemin initiatique. Paradoxalement, le destin m’a permis de révéler cette facette ignorée de moi-même. L’Asie m’a vraiment accaparée pendant des années.
J’ai tourné au Japon, en Inde, dans l’Himalaya, au Vietnam. Ma présence là-bas était importante, j’ai travaillé longtemps pour LVMH en étant le visage de Dior pour l’Asie… bref, c’était assez dingue.

TM : Quel est le film qui a le plus marqué positivement ta vie d’actrice ?

MJ : Il y a d’abord eu La Vallée des fleurs car j’ai tourné dans l’Himalaya pendant quatre mois durant lesquels on privilégiait les décors plutôt que le confort, à plus de 4 000 ou 5 000 mètres d’altitude, en bivouac comme des nomades, affrontant des aventures humaines et physiques hors du commun. Ensuite, c’est le dernier film que j’ai tourné, avec Roschdy Zem, Vincent Lindon et Pio Marmaï, Les Années 10, un film de Thierry de Peretti, qui je pense sera présenté à Cannes cette année. C’est un film d’hommes, assez dur. Je joue la femme de Roschdy. Depuis des années, je rêvais de rencontrer
ces acteurs et de travailler avec eux.

TM : Parle-nous de ta vie d’aujourd’hui, de tes projets immédiats, de ce que tu aimerais VRAIMENT faire…

MJ : Quand j’ai eu Andreas, j’ai pu retourner à l’école. C’était primordial, car même si j’ai adoré mes 10 ans en Asie, quand tu as un enfant, tu ne veux pas être loin de lui. J’aime mon métier mais je veux consacrer ma vie à ma famille. Rien ne me comble plus aujourd’hui. J’ai fait cette école pour pouvoir me présenter différemment aux gens. Je n’ai plus envie d’être cette fille sexy, exotique mais plutôt d’être ancrée dans le sol. Après cette grande école, j’ai pu enfin devenir scénariste et écrire pour des boîtes de production, ce qui était aussi un de mes rêves. Et du coup, je peux travailler d’où je vis, en Grèce, et offrir à mon fils la possibilité de découvrir ses racines grecques et d’apprendre la langue. Quelque chose que moi, enfant, je n’ai pas pu faire…