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Coline FAULQUIER & Laëtitia VISSE, les toquées de la réussite

Un mistral gagnant souffle sur la gastronomie de notre belle cité phocéenne ! La trentaine à peine révolue, elles ont visé la lune pour mieux atterrir dans les étoiles : Coline Faulquier, seule cheffe marseillaise récompensée d’une étoile Michelin pour son restaurant Signature, et Laëtitia Visse, Jeune Talent Gault & Millau honorée d’une assiette Michelin pour La Femme du boucher, s’imposent comme les leaders de cette génération de super cheffes, qui révolutionnent l’art du bien-manger et ajoutent de précieux rayons au soleil de Marseille.

Femmes de tête, femmes de toques Tempéraments bien trempés, talents incontestés, yeux pétillants et sourires communicatifs font de Coline et Laëtitia d’heureux modèles de réussite. Avec elles, on se sent bien, comme avec des copines fortes et indépendantes, le genre à renverser la table et, dans un même mouvement, les préjugés, pour les tourner à leur avantage. Partie de son Vaucluse natal à 15 ans pour rejoindre l’école hôtelière d’Avignon, Coline Faulquier a toujours eu le goût du terroir et des produits de qualité, résultat d’une éducation « nature », dans le corps de ferme de ses parents. D’un naturel exigeant, elle se fixe sans cesse de nouveaux buts à atteindre, en quête de perfection. Après avoir ouvert La Pergola avec son ex-compagnon, elle a lancé l’établissement de ses rêves, le Signature, dans le 8e arrondissement. En apportant de la technique à des produits basiques, elle s’exprime avec assurance et fait de ses plats un prolon-gement de sa personnalité. « Ma maman me faisait du petit salé aux lentilles étant enfant, j’aimerais bien le revisiter », nous confie-t-elle. Un premier point com-mun entre les deux cheffes ? En effet, Laëtitia Visse s’inspire dans toutes ses créations de recettes d’antan. Sa cuisine, beaucoup plus « viandarde » et charcutière, lui vaut même le surnom « d’au-todidacte de la bidoche ». Nor-mande d’origine, elle a l’habi-tude des préparations au beurre, et fait le pari de convertir les Marseillais « poissonniers » aux joies de la barbaque. « L’idée, c’est de renouer avec douceur sans braquer ceux qui n’ont pas l’habitude », explique-t-elle. En sortant de l’école Ferrandi, au début des années 2000, Laëtitia accumule les expériences chez des grands noms : Guy Savoy, Alain Dutournier ou encore Cyril Lignac. C’est sa rencontre avec Thomas Brachet, chef du restaurant Les Arlots, qui change sa vision de la cuisine et la libère des carcans étoilés. Elle découvre les morceaux de viande que sa génération a délaissés et les remet au goût du jour. À Marseille, elle trouve sa place d’abord au bar de La Relève où son profil de jeune cheffe atypique plaît aux habitués. Les Marseillais, déjà conquis par la « saucisse de Visse », sont définitivement convaincus par La Femme du boucher, ouvert dans une ancienne boucherie près de la place Castellane. Marseille, champ des possibles Pourquoi cette soudaine vague de réussite gastronomique déferlant sur la cité phocéenne ? Les deux cheffes répondent à l’unisson : « Ici, c’est une terre neutre. Il y a tout à faire et en même temps tellement de richesses. La mer, les denrées et les paysages sont envoûtants. » Pour Coline, « Marseille est au début de quelque chose de grand en matière d’art culinaire ». Les deux consoeurs affectionnent particulièrement la relation privilégiée qu’elles entretiennent avec leurs fournisseurs : « À Paris, ils étaient des numéros de téléphone dans mon réperl’toire. Ici, je peux les rencontrer autour d’un café », se félicite la cheffe Visse. Le travail de la précision et la minutie pour Coline, le sens aigu du partage et le goût de la bonne chère pour Laëtitia ont pour seule fin de procurer du plaisir aux clients. Selon la toquée tout juste décorée, être bien dans sa tête est la clef des étoiles. Faire face à la crise Mais comment faire front quand on est brimé ? « On repousse ses limites en créant à partir d’autres choses. La motivation des équipes est si grande, l’amour du métier si fort que la contrainte force l’évolution », positive Coline, qui se réinvente avec des menus à emporter. Cette parenthèse lui a permis d’apprécier sa récompense et d’anticiper l’avenir. Rester fidèle à sa cuisine en visant toujours plus haut, c’est le beau pari de la grande Faulquier. Laëtitia a pour sa part profité de sa visibilité médiatique pour mettre en lumière les vices d’un milieu qui prône la gran-deur sans pourtant être irréprochable : « En déclarant avoir été humiliée par de grands chefs, je remets en question leurs égos. Pour certains, la place de la femme est à la maison mais pas dans une brigade étoilée, confie-t-elle, je ne mène pas de combat, je souhaite simplement souligner que la violence et l’autoritarisme ne sont pas nécessaires pour réussir dans ce métier. Des chefs comme Coline, Alexandre Mazzia (AM) ou Matthieu Roche (Ourea) en sont la preuve. » Cette année, la prometteuse Laëtitia Visse espère pour-suivre ses collaborations avec des chefs de la région, no-tamment grâce au projet Gourméditerranée mené par Lionel Levy. Enfin, les deux Marseillaises d’adoption espèrent bientôt servir leur cuisine à table, comme si le virus n’était qu’un mauvais film de série B dont on se moquerait à la sortie du ciné.

SIGNATURE

180 rue du Rouet, Marseille 8e

04 65 85 53 48

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LA FEMME DU BOUCHER

10 rue de Village, Marseille 6e

04 91 48 79 65