CharlElie / My New York
L’artiste « multiste » (poète, photographe, peintre, chanteur, compositeur, sculpteur, écrivain, designer) CharlElie Couture habite à New York depuis une dizaine d’années. Il a désormais la double nationalité franco-américaine. Puisqu’il vient exposer à Marseille, pour la première fois, chez David Pluskwa, une vingtaine d’œuvres récentes, c’est l’occasion pour tous de découvrir le travail exceptionnel de cet artiste aux talents multiples.
ToutMa : Tous les Français des années 80 t’ont connu sous le nom de CharlElie Couture : Pourquoi Couture à l’époque ? Pourquoi « Couture » a-t-il disparu ?
CharlElie Couture : Depuis des années je signe mes toiles et tout ce que je fais sous mon prénom. Mais je suis le premier CharlElie sur terre, comme souvent les gens ne comprenaient pas le mien, ils me le faisaient répéter… Mon prénom me ressemble, il est double, formé par l’association des prénoms de mes deux grands-pères : Charles et Elie. J’assume cette dualité. Mais si on veut dire Couture, pas de problème.
TM : Tu dis avoir fui les carcans du milieu artistique français. Quels sont-ils ?
CC : En France on te définit à l’imparfait, par ce que tu AS fait. Même si j’ai fait mes premières expos dès l’âge de quinze ans, puis les Beaux-Arts, etc., les médias se sont d’abord intéressés à mon parcours musical. Je me sentais un peu à l’étroit dans des jugements qui réduisaient mes recherches esthétiques à une activité annexe.
TM : Ta carrière musicale fut pourtant intense dès le départ et ton talent reconnu presque aussitôt. Tu parles de reconstruction par l’art depuis ton exil volontaire en 2004… Où se situe le point de rupture intérieur ? Quels « maux » le traduisent ?
CC : Mon père m’avait toujours encouragé à poursuivre cette quête d’esthète que lui, ancien professeur d’histoire de l’art comprenait mieux que la musique. Quand il a quitté ce monde, sans ses références et ses analyses, je me suis retrouvé confronté à mon destin. Tous les artistes dont j’admirais l’œuvre avaient, un jour ou l’autre, habité à New York. J’y suis venu pour apprendre à me RE-connaître en toute liberté, sans autres formes d’influence que celle des démons et pulsions qui m’habitent depuis ma petite enfance.
TM : Ton dernier album, sorti en 2011, s’intitule « Fort Rêveur ». Tu joues volontiers avec les 2 langues pour nourrir ton langage poétique, mais le français domine malgré tout… Le musicien-chanteur est-il exclusivement réservé à la France ?
CC : J’ai enregistré un disque en anglais qui est actuellement en exclusivité sur un site américain réservé aux réalisateurs de films et de séries télé. Mais je me suis installé à New York pour l’art. Les Américains qui me visitent ne savent rien de mon parcours musical, ça ne les empêche pas d’apprécier ma peinture. La peinture est universelle, pas la poésie.
TM : Qu’est-ce que l’art t’apporte que la musique seule ne te donne pas ?
CC : Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit de moyens d’Ex-pression. On est sous pression et il faut que ça sorte. Ça prend une forme ou une autre. De même on choisit un outil en fonction de la tâche qu’on doit accomplir, de même je m’exprime soit avec les mots, la musique ou les arts visuels selon les émotions que je veux mettre en forme. Choisir son média, en fonction de ce que l’on veut exprimer, c’est cela le « multisme » : une alternative à cette notion de spécialisation.
TM : NYC comme point de renouveau, ville de tous les possibles, selon toi. Décris-nous ta fascination…
CC : New York c’est Babylone qui tend à s’élever sans cesse. Aller plus haut, plus loin, etc. C’est aussi une ville multiculturelle, un kaléïdoscope qui se reconstruit tous les jours. New York ce sont des milliards d’idées comme des étincelles, ça se forme et se déforme en fonction des regards que l’on porte. New York est une ville dans laquelle le travail est encore un moyen de se réaliser, une toupie qui réinvente en permanence son mouvement, alimentée par l’énergie des gens qui veulent y croire coûte que coûte.
TM : Regard photographique, pictural ou écrivain… tu te poses en observateur du monde qui t’entoure. Que veux-tu montrer à ton tour ? Que veux-tu laisser derrière toi ?
CC : J’aime bien ta question, car, je veux montrer un monde sans pour autant le DE-montrer. Je juxtapose la vision captée du monde réel, qui est celle de la photographie, avec cette formalisation du monde intérieur telle qu’on pourrait définir la peinture. Je trame mes peintures dans une infrastructure complexe de codes et de symboles qui seraient difficiles à résumer en quelques lignes. Je ne cherche pas à prendre le contrôle de quoi que ce soit, avant tout l’art est un ressenti.
TM : La REGallery est-il un lieu exclusivement dédié au talent de CharlElie ? Une concentration nécessaire pour une création pluridisciplinaire ?
CC : C’est en effet pour l’instant un lieu qui me permet de présenter mon travail. J’ai montré le boulot d’autres artistes Américains, mais ce n’est pas la vocation première de cette galerie atelier qui se situe en plein cœur de Manhattan.
TM : CharlElie Designer… une montre, des souliers, des tatouages. Un jeu ? Des opportunités ? Une finalité ?
CC : Oui tout cela à la fois. Un jeu, des occasions de créer des choses accessibles à travers des éditions. L’art se doit de rester ouvert à toutes les formes d’expression en utilisant aussi l’outil de production industriel, si les critères d’exigence et de qualité sont respectés.
TM : Tu exposes bientôt à Marseille. Pourquoi notre ville ? Qu’en penses-tu ? Quelle fut ta rencontre avec David Pluskwa ?
CC : J’ai rencontré David Pluskwa par l’intermédiaire de mon ami l’artiste Jak Espi. C’est lui qui a fait la jonction entre nous. David est venu me voir à mon atelier parisien lors d’un de mes passages en France et le courant est passé tout de suite. Un respect mutuel. Les métiers de l’art sont particulièrement difficiles, car ils dépendent d’envies abstraites, que certains peuvent juger inutiles. Acquérir une réputation dans le monde de l’art se fait lentement et la crédibilité est fondée sur la confiance. David est un vrai professionnel qui a su créer cette relation d’amitié, aussi bien avec les artistes qu’avec ses collectionneurs. Marseille cette année démontre sa capacité à être le pôle central d’une culture européenne jeune et dynamique. Beaucoup attendaient cela depuis longtemps. J’ai pas mal d’amis ici et c’est un plaisir de venir à Marseille chaque fois que j’en ai l’occasion. J’espère partager ce plaisir avec ceux qui viendront voir les œuvres nouvelles « Photo-grafs and Paintings » que David a spécialement sélectionnées pour vous.
Exposition du 18 octobre au 16 novembre
Galerie David Pluskwa Art Contemporain _Espace 53 rue Grignan Marseille 6ème
www.galerie-pluskwa.com
www.charlelie-officiel.com
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