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Pierre-François Martin-Laval, tournant cinématographique

 

Dans un registre plus surprenant que la plus absurde de ses comédies, Pierre-François Martin-Laval, aujourd’hui réalisateur et metteur en scène, nous propose un film à la tonalité dramatique. Adaptation du roman biographique Un roi clandestin, son prochain film relate le récit de Fahim Mohammad, jeune réfugié bangladais et joueur d’échecs. Du noir au blanc, une histoire pour changer les mentalités. 

Le clown PEF

Si on est à Paris, c’est PEF. Si on est à Marseille, c’est Pierrot. Et si vous avez le temps, c’est Pierre-François Martin-Laval », explique le trublion que l’on a d’abord connu comédien, avant qu’il ne devienne réalisateur. Sous ses traits folâtres et l’expression fragile d’un sourire immuable, c’était lui l’acteur tour à tour M. Merdocu et M. Marcadet. Saccageant de cris nos écrans de télévision et souillant les scènes de théâtres de blagues acéteuses, Les Robins des Bois sont nés à une époque où l’on ne se faisait plus baptiser. Né à Marseille en 1968, c’est lorsqu’il part étudier au cours Florent en 1989 qu’il rencontre Jean-Paul Rouve, Marina Foïs et Maurice Barthélemy. La troupe se forme en montant des pièces et en faisant les quatre cents coups dans les théâtres parisiens. Dominique Farrugia les repère, et Canal+ devient leur repaire. 

Au début des années 2000, le groupe se sépare pour laisser chacun entamer sa carrière solo. En 2006, PEF s’essaie à la réalisation avec Essaye-moi, puis continue en signant plusieurs adaptations de bandes dessinées comme Les Profs ou Gaston Lagaffe. « Quand j’étais petit je voulais être clown. Je montais des spectacles à l’âge de 5 ans. Je faisais des blagues, des cascades… Je me suis rendu compte en grandissant que c’était la mise en scène qui me plaisait. Je n’ai pas pu être clown ou faire du cirque, mais je m’en rapproche », racontera-t-il plus tard lors d’une interview. Un troisième œil ne battant finalement pas les cils seulement pour le burlesque, puisque son prochain film risque de nous donner la larme. 

Pirouette cinématographique

Février 2014, PEF visionne l’émission de Laurent Ruquier. Le présentateur interviewe un jeune Bangladais de 14 ans à l’occasion de la sortie de son livre Un roi clandestin. Pour PEF, c’est une évidence :  « Je n’en ai encore jamais entendu parler mais je suis à la fois fasciné et bouleversé par ce garçon qui raconte d’une voix calme pourquoi, à l’âge de 8 ans, il a dû soudainement quitter sa mère et son pays natal ; comment, ensuite, après avoir débarqué avec son père en France, sans en connaître ni la langue ni la façon de vivre, il a réussi à survivre et à devenir, quatre ans plus tard, malgré son statut de SDF sans papiers, le champion de France d’échecs des moins de 12 ans. Quel parcours ! Mon sang de cinéaste ne fait qu’un tour. J’ai aussitôt envie de faire un film. » Un récit touchant, un tournant cinématographique pour le réalisateur. Une valse entre le caractère aléatoire de la clandestinité et celui planifié du jeu d’échecs, Fahim n’a eu aucun moyen d’anticiper sa vie. Sur le grand écran, c’est Assad Ahmed qui l’incarne. Un jeune acteur qui s’est lui-même retrouvé pris dans le jeu hasardeux de la vie. Alors qu’il accompagne un proche au casting, il se fait repérer. Assad refuse le rôle, son père le pousse à accepter. Arrivé lui-même il y a quelques mois du Bangladesh, il ne parle pas français. Durant le tournage c’est une traductrice qui accompagne l’enfant. « Le petit Assad ne jouait pas non plus du tout aux échecs et il a pris des cours intensifs. Il a vraiment une nature qui est quasiment la même qu’à l’écran. Il est fier, c’est un combattant », dévoilera PEF durant une avant-première. Rythmé par les remarquables jeux d’acteurs de Gérard Depardieu et d’Isabelle Nanty, ce film nous rappelle que l’on peut retrouver Robin des Bois au cinéma : celui-là prend de riches histoires pour les redonner aux pensées nécessiteuses. Un conte moderne pour enrichir l’esprit, un biopic qui nous questionne. 

Fahim en salle le 16 octobre

PHOTOS _Christophe Brachet