
Nadia Léger au festival du Dessin d’Arles Jusqu’au 11 mai
On parle de l’effet Mathilda pour évoquer l’invisibilisation de la contribution des femmes à la science (et souvent même le pillage de leur travail par des hommes). À bien y réfléchir, il faudrait trouver un prénom pour évoquer le même phénomène chez les artistes qui, en la matière, ne sont pas en reste. Et qu’on ne me lance pas sur Camille Claudel, il y a des balles qui se sont perdues pour moins que ça. Si au xxe siècle Frida Kahlo a presque fini par éclipser son époux, Diego Rivera, Nadia Léger commence seulement à sortir timidement de l’anonymat et à se faire un prénom à côté du patronyme de son mari Fernand, notamment grâce au travail remarquable de ses ayants droit et à la faveur de l’exhumation de dessins, remisés depuis Hérode dans quelques cartons de collectionneurs autrement nommés : « le placard de l’histoire ». Alors forcément, on est ravi que le festival du Dessin d’Arles lui consacre cette année une exposition à sa hauteur, sous le commissariat d’Aymar du Chatenet, grand spécialiste du dessin et plus particulièrement de la bande dessinée.
L’exposition présente l’évolution de son œuvre des années 1920 aux années 1970. Dans une grande variété de styles et d’influences (on part de monochromes non figuratifs pour aboutir à des portraits suprématistes à la gouache… on a dit « suprématistes », pas « suprémacistes », notez bien), Nadia Léger explore toute une palette de thématiques, avec, certes, une petite prédilection pour l’ambiance « république prolétarienne socialiste ». Ses portraits (Lénine, Youri Gagarine, Maïakovski…) sont particulièrement frappants et préfigurent les meilleures pièces du Sots Art (cousin russe du Pop art) tout en rappelant les grands principes du Bauhaus, comme en témoignent ses choix de couleurs. S’il y a une exposition à ne pas manquer pendant le festival, c’est indiscutablement celle-ci ! CBé

Photo : Nadia Léger Vladimir Maiakovski © Adagp, Paris, 2025
Espace Lee Ufan Arles
Hôtel Vernon, 5 rue Vernon, Arles
Photo en Une : Nadia Léger Projet pour une mosaïque de l’Aéroflot © Adagp, Paris, 2025