Man Ray, la photographie de mode à l’honneur dans les musées marseillais
Faire de la photographie de mode un art à part entière, tel était le pari du singulier Man Ray. Deux musées de la Ville de Marseille (le musée Cantini et le musée des Arts décoratifs, de la Faïence et de la Mode) nous invitent à découvrir comment ce New-Yorkais, qui ne semblait pas spécialement prédestiné à devenir photographe, et encore moins dans la mode, quitta la « grosse pomme » en 1921 pour embrasser la scène parisienne et les salons courus du Montparnasse des Années folles.
Le challenge de Man Ray était double, à l’image de cette exposition qui offre une dualité complémentaire : devenir photographe alors qu’il ne l’était pas, et transformer la photographie de mode, essentiellement statique et commerciale, en véritable champ artistique.
Membre du courant surréaliste, c’est d’abord auprès des dadaïstes que Man Ray fit son entrée parisienne avant, presque par hasard, d’être sollicité pour photographier des modèles. Ces commandes, initialement à visée commerciale, prirent pourtant un tout autre tournant, puisque les magazines et journaux de mode recherchaient justement auprès de l’artiste un regard nouveau. Qui mieux qu’un surréaliste pouvait en effet dépoussiérer l’image surannée que les médias de l’époque présentaient de la mode et lui impulser une nouvelle dynamique esthétique ?
Man Ray fut l’un des pionniers des transformations de la photographie de mode, domaine jusqu’alors peu médiatisé. Les techniques du surréalisme furent au centre de cette métamorphose : scandale, provocation, érotisme, corps de la femme dévoilé, mises en scène… succédèrent ainsi au classicisme des magazines de l’époque tels que Vogue ou Harper’s Bazaar. Son savant mélange de provocation et de tradition fit du New-Yorkais un photographe recherché des journaux et grands médias du secteur : démocratiser la mode, oui, mais, toujours avec mesure et bon goût. Ajoutez à cela une parfaite maîtrise des effets spéciaux (cadrages avant-gardistes, solarisation, colorisation, surimpression) et le résultat est sans appel :
la photographie de mode devait ne plus jamais être la même.
Les musées de Marseille nous offrent ainsi la possibilité de mesurer cette évolution par nous-mêmes. Construite sous le commissariat de Claude Miglietti et de Marie-Josée Linou, cette double exposition s’articule autour d’une complémentarité bienvenue. Au musée Cantini, vous admirerez les mutations de la photographie de mode sous l’impulsion de Man Ray, tandis que le château Borély, abritant le musée des Arts décoratifs, de la Faïence et de la Mode, vous présentera la mode du temps de l’artiste : celle des années 1920 et 1930, encore appelées les Années folles ou l’entre-deux-guerres : robes du soir, lingerie, coiffure, maquillage, magazines numérisés de l’époque ainsi qu’agrandissements d’autochromes sont au rendez-vous. Les convenances de l’époque ne sont pas non plus oubliées, entre salons mondains, femmes du monde et célébrités habillées par Coco Chanel.
La véritable fresque d’une époque souvent présentée comme avant-gardiste, libérée, insouciante… et indubitablement regrettée. Lier l’art à la mode, l’art à la vie, c’est en ce moment à Marseille.
Man Ray, photographe de mode
jusqu’au 8 mars 2020
Musée Cantini
19 rue Grignan, Marseille 6e
La mode au temps de Man Ray
Château Borély
avenue de Clot-Bey, Marseille 8e
Du mardi au dimanche de 9h30 à 18h
tarif : 9 € / réduit : 5 €
billet combiné pour les deux expositions : 12 € / réduit : 8 €
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