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Angelin PRELJOCAJ, genèse d’une création chorégraphique, Répétition publique et rencontre

« Aujourd’hui nous ne répéterons pas Helikopter comme prévu, nous allons travailler sur ma nouvelle création. Tout ce que vous allez voir n’existe pas encore. Les danseurs ne savent pas ce qu’ils vont faire, et moi non plus… » Un rire parcourt la salle pleine à craquer du théâtre du Pavillon Noir. Pourtant, sans vouloir être solennelle, cette déclaration annonce bel et bien un petit miracle : là, sous nos yeux, l’artiste va créer.

Nous assistons, ébahis, à la naissance d’une œuvre chorégraphique, tout au moins à une partie de sa gestation. Angelin Preljocaj exécute quelques mouvements, ponctués par un compte rythmé, suivi par 12 danseurs hyper concentrés. C’est brouillon, « laborieux », selon les mots du chorégraphe lui-même. Pourtant, absolument aucun geste ne semble tenir de l’improvisation. « Vous avez raison, c’est ridicule ! » plaisante Angelin. Des rires répondent à la plupart des sorties du chorégraphe, la connivence est palpable entre lui et son public, aussi assidu qu’attentif, sans parler de sa complicité avec ses danseurs ; il les invite à imiter un saut délicat en leur lançant un espiègle « bonne chance ! ». Pour finir cette séance, la création musicale signée Laurent Garnier, elle aussi en gestation, est lancée pour un rendu en musique des quelques minutes d’enchaînements littéralement créés sous nos yeux. Angelin Preljocaj remercie chaleureusement ses danseurs pour l’énergie donnée lors de ces trois quarts d’heure de performance. Quant au public, il n’a qu’une hâte : découvrir la création dans son entièreté !

Photo de droite : © Jc Carbonne

ToutMa : L’interaction avec les spectateurs vous apporte-t-elle quelque chose dans le processus créatif ? À moins que vous ne leur offriez simplement ce moment de pure création…
Angelin Preljocaj : Oui, j’offre un moment au public, je mets à profit cette répétition, qui est une séance de travail à part entière, ce n’est pas juste pour montrer quelque chose que j’ai déjà fait. Là, on a ramassé de la glaise et ça va prendre sa forme finale progressivement. Pour l’instant, c’est de la matière ; je suis à l’écoute des danseurs, nous devons produire du langage, du vocabulaire, produire la grammaire qui va étayer cette dramaturgie. La structure choré- graphique doit suinter le thème.

TM : Votre complicité et la facilité de mémorisation des danseurs sont impressionnantes. Les interprètes avec lesquels vous travaillez sur ce type de création sont-ils toujours les mêmes ?
AP : La complicité que vous avez notée est valable avec les 30 danseurs que compte la compagnie ; ils restent souvent longtemps avec moi, j’ai cette chance. Cela crée une complicité, une dynamique aussi et cette sensation d’être réunis comme une tribu autour d’un même projet. Les 12 interprètes ici présents seront ceux de la prochaine création, ainsi que de la reprise d’Helikopter, pièce de 2001 (déjà 24 ans, j’ai l’impression que c’était hier !) avec laquelle celle-ci sera couplée.

TM : Justement, parlez-nous de cette nouvelle création et son lien avec Helikopter.
AP : C’est une commande du Théâtre de la Ville de Paris qui voulait un programme autour d’Helikopter. C’est à la fois un hommage et une projection vers l’avenir. C’est la réponse à Helikopter, qui transporte le spectateur dans une expérience sonore et visuelle passionnante, mais tout de même un peu sombre. Avec cette réponse, je voulais qu’on passe tout à coup du côté de la lumière. Voilà, j’essaie aussi de faire un clin d’œil à Stockhausen depuis notre planète vers là où il est actuellement, c’est-à-dire un paradis…

À Paris au théâtre Sarah Bernhardt, du 10 avril au 3 mai 2025
Et du 13 au 17 mai au théâtre du Pavillon Noir, puis au Théâtre de l’Archevêché les 30 et 31 juillet
preljocaj.org

Photo en Une : © Didier Philispart