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Alexis Pentcheff, l’art et la mer

Bousculant les codes du monde de l’art moderne, Alexis Pentcheff suscite l’engouement général en installant sa galerie emblématique dans le quartier pittoresque de Malmousque. Désormais, celle-ci surplombe majestueusement la mer. Après plus de deux ans de restauration de l’historique Pavillon de la Reine Jeanne, la Galerie Pentcheff ouvre enfin ses portes au public à partir du 3 octobre avec une superbe exposition dédiée à la Méditerranée. Rencontre.

ToutMa : Quel talent que d’inaugurer la première galerie d’art sur la mer ! D’où vient l’idée, l’envie ?
Alexis Pentcheff : Mon épouse et moi avons eu un coup de cœur pour Malmousque. Il y a quelques années, nous avons décidé d’y vivre et depuis, nous avons observé son attractivité croissante. Il y a trois ans, nous avons eu l’opportunité d’acquérir le Pavillon de la Reine Jeanne, cette demeure chargée d’histoire qui veille sur le petit port depuis la fin du XIXe siècle. C’était le lieu rêvé pour présenter des tableaux dans notre spécialité. La galerie a en effet toujours défendu les peintres qui se sont inspirés de la Méditerranée et de sa lumière. Nous avons donc décidé de réveiller cette belle endormie et de faire confiance au cabinet d’architecture Bertrand Guillon pour orchestrer les travaux qui ont été longs et délicats…

TM : Le fonctionnement de cet emplacement n’est-il pas complexe ?
AP : L’emplacement de la galerie est assez insolite. Nous voulions avant tout accueillir nos clients dans un cadre privilégié, leur montrer une image positive et dynamique de Marseille, où ils hésitent parfois à venir en raison de la mauvaise publicité. Nous sommes fiers de rouvrir cette maison historique aux Marseillais et de pouvoir les accueillir, qu’ils soient des amateurs éclairés ou de simples visiteurs. Nous souhaitons ainsi, à notre échelle, participer au rayonnement culturel de notre ville.

TM : Quels artistes peintres seront représentés au Pavillon de la Reine Jeanne ?
AP : La galerie est spécialisée dans la peinture des XIXe et XXe siècles. Je suis d’ailleurs expert dans cette catégorie auprès de la Chambre nationale des experts spécialisés. La plupart du temps, les œuvres ont un lien avec le Sud de la France, soit parce que le peintre est d’ici ou y a vécu, soit parce qu’il y a consacré une partie de sa production. On peut citer Pierre Bonnard, Henri Manguin, Albert Marquet… Nous avons ce fil rouge, mais nous restons ouverts à diverses opportunités. Par exemple, nous avons acquis le fonds d’atelier du dessinateur de mode et grand ami de Christian Dior, René Gruau, et organisé une grande rétrospective sur l’architecte designer Marc Held. Ce sont des rencontres, des sensibilités et des affinités qui guident le chemin de la galerie.

TM : On dit que derrière chaque grand homme se cache une femme forte…
AP : Giulia est mon associée à parts égales, depuis toujours. Si c’est mon nom qui sert d’enseigne, le travail est vraiment partagé car nous sommes très complémentaires. À moi la commercialisation des tableaux, à Giulia les travaux de recherche, d’écriture, et de présentation. Nous discutons ensemble de tous les projets et de toutes les acquisitions, et nous sommes souvent… en désaccord (rires) ! Giulia est la prudence même, tandis que je suis très entreprenant. Entre ces deux extrêmes, il faut sans cesse inventer des solutions… Mais cela fonctionne. Et aussi grâce à notre superbe équipe qui travaille d’arrache-pied à nos côtés, à son implication et à son soutien sans faille…

TM : Pourquoi avoir choisi ce métier ?
AP : J’ai étudié l’histoire de l’art à la faculté d’Aix-en-Provence mais je ne m’y suis pas éternisé. J’ai toujours aimé le contact avec les objets, apprendre d’eux, de leur vécu, savoir si on est ou non en bonne compagnie… On développe ainsi une sorte d’instinct pour les œuvres, qui va aussi avec l’amour qu’on leur porte. J’ai ouvert ma première galerie rue Saint-Jacques, à Marseille. J’étais très jeune, j’ai beaucoup appris « sur le tas », en conditions réelles et sans filet. La passion qui nous anime est le meilleur guide dans l’apprentissage du monde infiniment vaste de l’art.

TM : As-tu des conseils à donner aux jeunes qui voudraient devenir galeristes ?
AP : Il faut voir et toucher le plus d’objets possible. Cette perception physique s’assortit d’une connaissance un peu plus livresque. Il faut être capable de déterminer le contexte historique d’un objet ou d’un tableau, de le replacer dans son époque pour pouvoir jauger son importance, sa valeur. Il faut aussi être un bon gestionnaire. La communication est également un domaine indispensable. Parler anglais est essentiel pour participer à des foires internationales, un passage obligé pour les galeries d’importance…

GALERIE PENTCHEFF
PAVILLON DE LA REINE JEANNE
10 chemin du Génie, Marseille 7e
www.galeriepentcheff.fr

© Photos : Timothé Leszczynski